D'une main tremblante, Louis-Charles-Alfred de Musset brisa le cachet de la missive parfumée. Sa lecture le fit rougir de bonheur et de plaisirs anticipés. L'imagination en flammes, il y répondit à chaud, et tout aussi spirituellement. Notez, tout de même, qu'il fait peu confiance à l'intelligence de sa lectrice, en lui indiquant comment décoder sa très courte missive. Cher Alfred...
George Sand, elle, ne lui donne pas d'indice...
Quand je mets à vos pieds un éternel hommage
Voulez-vous qu'un instant je change de visage?
Vous avez capturé le sentiment d'un coeur
Que pour vous adorer forma le créateur.
Je vous chéris, amour, et ma plume en délire
Couche sur le papier ce que je n'ose dire
Avec soin, de mes vers lisez mes premiers mots
Vous saurez quel remède apporter à vos maux
Elle lui répond rapidement, en deux lignes:
Cette insigne faveur que votre cour réclame
Nuit à ma renommée et répugne à mon âme.
Voilà l'honneur est sauf, et les apparences bien gardées. Ils s'occupèrent du reste, ce que l'histoire n'a pas consigné.