Et cette autre déclaration de Barak Obama à Newsweek: «It's fascinating ... a wonderful book.» On s'intéressa donc au roman qui intéressait le Président. Les ventes montèrent en flèche. S'agirait-il d'un engouement passager? Ou d'un livre qui marquera la litérature d'une pierre blanche? Vous pensez bien que j'ai ma «petite idée»... Tout de même, poursuivons...
«Netherland», de Joseph O'Neill nous arrive donc, en français, précédé par un concert de louanges, encensé par la critique américaine, comparé à Gatsby le Magnifique -The Great Gatsby- de F. Scott Fitzgerald (1925) reconnu, aujourd'hui, comme un chef d'œuvre. Certaines critiques dithyrambiques portent le livre aux nues, en négligeant d'en parler directement: une prouesse de haute envolée! Rarement, pour ne pas dire jamais, je n'ai vu tant de propos «impressionnistes» autour d'un roman, même des «résumés» ne sont pas fiables. J'en arrive à me demander si tous ceux et celles qui en parlent ont lu le roman. Je suis sortie de ma virée sur Internet «l'âme en peine», emmêlée dans le fatras de la Toile. Quoi faire alors?
J'ai choisi d'aller faire une incursion du côté de la critique new-yorkaise: la plus près des évènements du 11-Septembre 2001, la plus concernée, celle qui sait.... Pour, ensuite, voler en rase-mottes, et raser les pâquerettes. Comme dit la (ma...) chanson «L'important, c'est... le livre».
Netherland: vu par la critique de New York
Dwight Garner (NYTBR)** écrit: «the wittiest, angriest, most exacting and most desolate work of fiction we've yet about life in New York and London after the World Trade Center fell.»
James Wood (the New Yorker): «One of the most remarkable postcolonial books I have ever read». Il ajoute que Netherland «has been consistently misread as a 9/11 novel, wich stints what is most remarkable about it: that it is a postcolonial re-writing of The Great Gatsby.»
Ces 2 critiques représentent l'ensemble de la critique new-yorkaise. Ces deux courtes citations font nettement ressortir les idées-clés du roman, et parviennent à dissiper la confusion et le brouhaha autour du livre.
-- «work of fiction». Le livre est une œuvre de fiction: il faut le lire comme tel... Ce n'est pas un récit, ce n'est pas un essai: c'est un roman. Même s'il relate ou mentionne des faits réels ou réalistes.
-- «about life... after...». Il porte sur la vie à New York et à Londres après le 11/09/01. «Alors que le monde entier ne croit plus en rien (...)», la quatrième de couverture. Hein? Le monde entier... en rien... ? Quelle boursouflure?
-- «remarkable postcolonial book». Mais aussi sur le racisme larvé qui rampe insidieusement. «You want a taste of how it feels to be a black man in this country? Put on the white clothes of the cricketer. Put on white to feel black». [Pantheon E Books, p. 22].
-- «consistently misread» James Wood, qui sait lire, constate que le livre est mal lu... «consistently misread as a 9/11 novel».
Une fois, le terrain de la lecture ainsi débroussaillé, on comprend pourquoi Netherland peut être comparé à Gatsby le Magnifique. Qu'en dit l'auteur, Joseph O'Neill?
À la question posée par Le Nouvel Observateur: «On voit sans cesse se côtoyer, dans «Netherland», la brutalité des États-Unis et les rêves de ses habitants. Cela rappelle un peu «Gatsby le magnfiique»...
...Joseph O'Neill a répondu: «(...) j'ai réalisé [en cours d'écriture] avec une certaine horreur que je suivais les de Scott Fitzgerald. Bien sûr, ce sont des empreintes énormes! J'ai une grande dette envers Fitzgerald, mais je n'ai évidemment pas essayé de réécrire un chef d'œuvre.» «Un entretien avec l'auteur de «Netherland».
Cet entretien fait suite à l'article «Joseph O'Neill, l'élu d'Obama», de Philippe Boulet-Gercourt, sur BibliObs, dont je cite le dernier paragraphe:
«Michoko Kakutani, la papesse littéraire du "New Yorker, y voit une "méditation sonore sur le rêve américain" dans laquelle «Manhattan est une peinture de Magritte". Mais il faudra attendre juin 2009 [le livre est sorti en mai 2008] pour que le livre connaisse la célébrité: un lecteur a fait savoir qu'il lit "Netherland" et se régale. Il s'appelle Barack Obama.»
Nous voilà revenus à la case départ... on dirait bien!
«Sometimes to walk in shaded parts of Manhattan is to be inserted into a Magritte: the street is night while the sky is day».
«Parfois, marcher dans les parties ombrageuses de Manhattan, c'est un peu comme être inséré dans un Magritte: la rue est plongé dans la nuit tandis que le ciel est de plein jour»
Je vous reviens demain avec des extraits de «Netherland», en américain ou en français? Avez-vous une préférence?
J'ai la mienne, bien sûr... Je vous dirai laquelle, et pourquoi... cela va de soi.
Bonne journée! À demain!
* David Leonhardt est chroniqueur économique au «The Times» et rédacteur au «Times Magazine». Citation tirée de l'article «After the Great Recession». À lire ici...
** NYTBR, New York Times Book Review. Dwight Garner est rédacteur en chef. Citation tirée de «The Ashes». Pour lire l'article, cliquez ici.
*** Citation tirée de «Beyond a Boundery», de James Wood, The New Yorker. L'article est ici...