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samedi 24 octobre 2009

Les écuries d’Augias / L’âne de Buridan

«Les écuries d’Augias» / «L’âne de Buridan». Avertissement! Les histoires de ce blogue sont purement fictives. Toute ressemblance avec l’actualité, d’ici et d’ailleurs, et même de l’au-delà de nulle part, ne sont que pure coïncidence. Qu’on se le dise, et qu’on le sache une fois pour toutes : j’aime les chevaux, j’aime les ânes. Mais, j’ai des favoris …

Bucéphale, le grand cheval noir d’Alexandre le Grand, inséparables monture et cavalier. Alexandre portait bien son nom qui signifie, en grec, «ami des chevaux»; et Bucéphale qui veut dire «à la tête de taureau». Fougueuse monture qui, jeune, avait peur de son ombre, la confondant avec l’arrivée d’un homme. Alexandre, âgé de 12 ans, mais déjà habile et intrépide cavalier sut comment l'amadouer et lui faire passer ses craintes, il dompta la bête farouche. Ils combattirent ensemble, et Bucéphale mourut à la guerre. Alexandre le fit enterrer avec les honneurs militaires.

Le grand cheval blanc de Lady Godiva loge aussi dans mon… écurie d’amour. Selon la légende, Lady Godiva aurait traversé nue sur son cheval blanc (dont j’ignore le nom) les rues Coventry (Angleterre), à la faveur de la nuit... Le but de cette équipée : convaincre son mari de diminuer les impôts prélevés pour financer ses campagnes militaires. Son époux, Léofric -le bien nommé-, comte de Mercie -merci?-, seigneur de Coventry qui lui avait lancé ce défi, par boutade, respecta sa parole et diminua, certains disent élimina, les taxes. Était-ce une parade pour se sortir d'une impasse? My dear and sweet Lady, si bonne… en chocolat!


Les écuries d'Augias.
Pour avoir commis des crimes involontaires,
Eurysthée imposa à Hercule (Héraclès) douze travaux*. S’il sortait victorieux de ces douze travaux et si douze années s’étaient écoulées, le héros pourrait songer à briguer l’immortalité -ce qui n'est pas rien. Le nettoyage des écuries d’Augias était le 6e de ces travaux. C’est donc par le biais de la légende de Héraclès qu’on a retenu le nom d’Augias…

Voici l’histoire. Augias, roi d’élide, possédait un riche et immense troupeau, mais il avait commis la négligence de ne pas nettoyer ses écuries –on avance le chiffre de 33 ans. Il chargea Héraclès de cette pénible, et humiliante, tâche. En retour, il lui donnerait le 10e de son troupeau s’il accomplissait le travail en une seule journée. Héraclès réussit : il ouvrit une brèche dans le mur et il y fit passer les eaux des fleuves Alphée et Pénée. Au soir, tout était propre. Mais Augias, se parjurant, refusa de lui payer le prix de son travail. Il prétextait que ce n'était pas lui qui avait nettoyé l'écurie, mais les dieux fleuves. Eurysthée, qui détestait Hercule, ne voulait pas admettre sa victoire, car il avait relevé un pari et avait été payé.

Un tribunal fut chargé de régler leur différend. Phyléos, le fils d’Augias prit parti pour Héraclès. Tous deux furent… condamnés et chassés de la ville. Furieux Héraclès et Phyléos revinrent avec une armée. Héraclès se rendit maître des lieux, tua Augias et le remplaça sur le trône par son fils Phyléos, qui avait su rester son fidèle compagnon.

D'où l'expression «nettoyer les écuries d'Augias». Pour «Le petit Robert», il s'agit d'une locution figurée (qui fait image... et odeur) et littéraire: «porter l'ordre, la propreté, dans un milieu corrompu, une affaire malhonnête». Au sens courant: «C'est une vraie écurie, se dit d'un local très sale.» «Entrer quelque part comme dans une écurie, sans saluer, d'une façon cavalière et impolie», voilà qui nous change de l'auberge espagnole...


L’âne de Buridan

Voici la légende. Un âne placé entre un seau d’avoine et un seau d’eau, ayant également faim et soif, se demande s’il va d’abord manger et puis boire ou s’il va d’abord boire et manger ensuite. Manger-Boire ou Boire-Manger. Il hésite: soupèse les avantages, évalue les inconvénients; tourne la tête à gauche, tourne la tête à droite; mal à l’aise au centre. Le temps passe, et n’arrange rien à l’affaire. Notre âne est toujours aussi hésitant. Pour cacher son malaise, de temps à autre, il lève la tête –gardant l’œil sur ses seaux-, il remue des oreilles, il braie… mais ne décide pas, ne se décide pas. L’avoine ou l’eau? L’eau ou l’avoine? Le temps passe… passe, et l’âne finit par périr, et de faim et de soif ou de soif et de faim…

L’âne de cette légende, que je vous raconte à ma façon, est-il bien un âne? Hum… L’âne de Buridan de la légende n’est pas de Buridan… On lui en attribua la paternité car elle était cohérente avec sa théorie, car le philosophe ­-Jean, de son prénom- considère qu’un homme peut différer son choix pour en évaluer les conséquences. On accola son nom à l’âne… pour le ridiculiser. Ironie du sort: les moqueurs sont tombés dans les oubliettes, et le nom de Buridan est passé à l’histoire, la petite [grâce à l’âne] et la grande [grâce à sa philosophie].

«Aristote se demandait comment un chien qui doit choisir entre deux nourritures différentes et également attirantes choisit entre elles». Un dresseur répondrait que le chien saute sur le premier plat et gronde au-dessus du deuxième, qu’il engouffre sitôt après… n’avancez pas la main. Le chat me semble plus astucieux… mais c’est une autre histoire.

Et il y a aussi l’âne qui mange à tous les râteliers et boit à toutes les sources… ce serait une histoire à inventer…

Spinoza se pencha sérieusement sur «L’ânesse de Buridan» (tiens donc!) « J’accorde tout à fait qu’un homme placé dans un tel équilibre ---- (j'entends, qui ne perçoit rien d'autre que la soif et la faim, tel aliment et telle boisson à égale distance de lui) mourra de faim et de soif. S'ils me demandent s'il ne faut pas tenir un tel homme pour un âne plutôt que pour un homme ? je dis que je ne sais pas (…) [trad. Fr. Bernard Pautrat, p.191 et 195, cité dans Wikipédia).

J’aime les ânes… dans la littérature. Ceux de Jean de La Fontaine, on connaît (on pense connaître : ce qui est, souvent, «équipollent»). Passons. J’ai mes favoris…

«J’aime l’âne», de Francis Jammes (poète et romancier français)

«J'aime l'âne si doux / marchant le long des houx.

Il prend garde aux abeilles / et bouge ses oreilles ;

et il porte les pauvres / et des sacs remplis d'orge.

Il va, près des fossés, / d'un petit pas cassé.

Mon amie le croit bête / parce qu'il est poète.

Il réfléchit toujours. / Ses yeux sont en velours.

[…]

L'âne n'a pas eu d'orge, / car le maître est trop pauvre.

Il a sucé la corde, / puis a dormi dans l'ombre...

(…)

Va trouver le vieil âne, / et dis-lui que mon âme

est sur les grands chemins, comme lui le matin.

(…)

«L’âne», de Victor Hugo

La vie

Fait quelques pas tremblants vers le bien, puis dévie. / L'homme est psaume qui soit; il est blasphème aussi. / Son âme est une lyre au son peu réussi / Où l'honnête a sa corde, où l'injuste a sa fibre; / Dans son pauvre esprit louche il tient en équilibre / Cauchon et Jeanne d'Arc, Socrate et Mélitus; / Il complète le bien d'où sortent ses vertus,/ Hélas, avec le mal d'où sortent ses fétiches; / Ce vers faux a Satan et Dieu pour hémistiches.

Réaction de la création sur l'homme

L'âne fit un silence, et, murmurant : — Voilà ! C'est ainsi. Je n'y puis que faire ! — il grommela: Se contredire un peu, Kant, c'est le droit des glose ; Quand on veut tout peser, on rencontre des choses. Qui semblent l'opposé de ce qu'on avait dit ; Non aux basques de Oui toujours se suspendit, Riant de la logique et narguant les méthodes ; Qui tourne autour d'un monde arrive aux antipodes ; Kant, je n'userai point de ce droit ; seulement Après t'avoir montré les hommes blasphémant, Niant, méconnaissant et méprisant la Chose, Cet océan où l'Être insondable repose, Il faut bien te montrer la Chose enveloppant Les hommes submergés dans Dieu qui se répand Et qui sur eux se verse et qui se verse encore, Tantôt en flots de nuit, tantôt en flots d'aurore ; Après t'avoir montré l'atome outrageant Tout, Il faut bien te montrer la grande ombre debout.

*Les douze travaux d'Hercule ont inspiré l'histoire d'Astérix, mais en plus moderne...
Sources: Wikipédia, Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine (Larousse), Kalliope.org, Le Petit Robert.

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