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dimanche 4 octobre 2009

Pierre Falardeau - Un homme libre

«Pierre Falardeau - Un homme libre.» Les funérailles publiques du cinéaste et écrivain, Pierre Falardeau (1946-2009) ont eu lieu hier, samedi le 03 octobre, en l'église Saint-Jean-Baptiste de Montréal. Sur Internet et dans les médias, les textes, les entrevues, les photos, les vidéos foisonnent. «Le Devoir», des samedi et dimanche 3 et 4 octobre 2009, a publié un cahier spécial. Parmi cette moisson abondante, j'ai choisi quelques textes que je fais miens, tout simplement. Plutôt que de paraphraser... ou redire ce que d'autres ont déjà dit, et bien dit.
Paroles d'un cinéaste. Paroles d'un écrivain et essayiste. Paroles d'un chroniqueur. Paroles et oeuvres de Pierre Falardeau. Suivront une audio, deux vidéos, deux entrevues, deux caricatures. Tout d'abord, parlons de liberté.

La liberté: en deux citations
«Mystère abyssal de la liberté humaine, mais mystère nécessaire: pour les mêmes raisons qu'il n'est pas d'éloge flatteur sans liberté de blâmer, le bien moral est inséparable de la possibilité du mal, c'est-à-dire de ce postulat mystérieux selon lequel l'homme possède, en dernier instance, une insondable liberté de choix». Kant, L'homme-Dieu, 1996, p.106.

Pierre Falardeau: «La Liberté n'est pas une marque de Yogourt», Éditeur Alain Stanké, 2000.

Liberté universelle.
«Earnig a wage is a prison occupation
and a wage earner is a sort of a gaol-bird.
Earning a salary is prison oversseer's job
a goaler instead of a goal-bird.
Leaving on your income is strolling grandly outside the prison, in terror lest you have to go in. And since the work prison covers
almost every scrap of the living earth, you stroll up and down
On a narrow beat, about he same as a prisoner taking his exercice.
This is called univeral freedom.
D. H. Lawrence

«Gagner un salaire est un métier de prison
et un salarié est une sorte de prisonnier.
Toucher un traitement est uns condition d'employé de prison,
c'est être un geôlier au lieu d'un prisonnier.
Vivre de vos revenus, c'est vous promener fièrement devant
la prison, plein de terreur à l'idée que vous pourriez être forcé d'y entrer. Et comme cette prison du travail couvre
à peu près chaque parcelle de la terre vivante, vous êtes réduit à faire les cent pas
le long d'un étroit passage, à peu près le même espace qui est alloué à un prisonnier pour ses exercices.
On appelle ça la liberté universelle.»
dans «Les idées des autres», Simon Leys, Plon, p. 58

Pierre Falardeau, «Le Party», film, 1989.


Paroles d'un cinéaste. Michel Brault
*
« Pierre était un grand patriote, flamboyant et impatient. Il a dû se battre pour s'exprimer en toute liberté. Son premier et unique sujet a été son pays, le Québec, et ses compatriotes qu'il aimait par-dessus tout. Comme un bûcheron, ses flms sont faits à la hache et au godendart. Ils ont le timbre de sa voix, que nous n'oublierons jamais.»

Pierre Falardeau, «15 février 1839», film, 2001. Réalisé grâce à une souscription publique et un spectacle-bénéfice, Téléfim Canada, sous la présidence de François Macerola, ayant refusé de financer le film.

«Le chef d'œuvre de Pierre Falardeau. C'est peut-être le plus beau film du répertoire québécois». Pierre Vadeboncœur.


Paroles d'un écrivain et essayiste. Pierre Vadeboncœur
**
«Alors. quand je me rappelle sa conversation (...), je me rends compte qu'une qualité ressortait de ses paroles comme de ses actes. Qu'était-ce donc? C'était, tout au fond, la bonté.
La bonté. La justice aussi, non pas une justice froide, mais plutôt celle, surabondante, non négative, dont on s'inspire pour rendre leur dû à ceux qui le réclament avec besoin: le peuple, la nation, les laissés-pour compte. (...) Mais il connaissait aussi une autre justice, une justice de combat, celle de son action politique. En cette matière, il était intraitable. Il ne faisait pas de quartier. Il ne cédait pas un pouce de terrain.»

Pierre Falardeau: «On va toujours trop loin pour les gens qui ne vont nulle part». ; «Pour les lâches, la liberté est toujours extrémiste».
«Notre pays a été conquis par la force et annexé par la force.» ; «La France a-t-elle célébré la bataille de Waterloo?»

À lui seul, il a fait avorter le projet fédéral de célébrer la bataille des plaines d'Abraham.
Dans cette foulée, une organisation citoyenne créera et organisera «Le Moulin à paroles», une mise en lecture des textes fondamentaux de l'histoire du Québec. (Brigitte Haentjens, Pierre-Laval Pineault, Sébastien Ricard)

Paroles d'un chroniqueur. Pierre Foglia***
«Si Falardeau est grand, ce n'est pas par le cinéma, ce n'est pas par la polémique, pas par l'écriture. C'est par la subversion. Il est grand de son refus des contraintes, de son refus de flagorner le pouvoir en particulier.
Dans Falardeau, c'est l'homme qui est grand.

L'honnête homme.
Pas honnête-scrupuleux-vertueux. Pas honnête et con comme un œuf qui n'a jamais volé un bœuf, pas honnête non plus comme peut l'être une politologue prof d'histoire (1), je ne veux pas dire honnête intellectuellement, de cette honnêteté purement cérébrale que n'irrigue jamais le sang du cœur.

Je dis un honnête homme. J'allais ajouter qu'ils sont rares, mais pas tant que cela. J'en connais d'autres, vous aussi vous en connaissez, des silencieux qui traversent la vie doucement "et aussi intimement que la couleur du ciel" (2)

Un honnête homme (...) à qui personne n'a jamais passé les menottes, 62 ans de liberté, de révolte.
Un honnête homme avec des fureurs imprécatoires. Jamais à la mode. Jamais dans le consensus. Toujours dans cette quête du pays qui en énervait tant. Avec cette extraordinaire capacité -qui n'est pas politique mais poétique- de transmuter sa libre parole en émotion pure.

Un honnête homme. Un poète. je vous le redis, la poésie est une clameur.*********

__ (1) Nommément Esther Delisle, politologue et prof d'histoire qui jubilait cette semaine dans nos pages, ce qui n'excuse pas Falardeau d'avoir dérapé à la mort de Claude Ryan, mais ceci explique peut-être cela.
__ (2) Walter Benjamin, écrivain juif allemand, que j'ai relu cet été dans Une enfance berlinoise.

* * *

Voici, maintenant, mes choix pour voir et entendre Pierre Falardeau, pour (mieux) connaître l'homme, le cinéaste et l'écrivain.

Une audio: le chroniqueur et le cinéaste
Pierre Foglia et Pierre Falardeau (non, ce ne sont pas des chums) s'interrogent sur la place des intellectuels au Québec, et abordent d'autres sujets. Chacun a son point de vue. Cette discussion «qui déménage», selon Francis Legault se déroule sur un ton agréable. Pour écouter cette émission produite par la SRC, cliquez ici

Deux vidéos: un critique littéraire français et
un écrivain québécois
Lors de l'émission «Apostrophe», Bernard Pivot «avait remarqué et distingué Pierre Falardeau, personnage du cru, un peu hirsute, ardent, et sa faconde, sa passion, son évidente authenticité. (...) Le Québécois n'ont généralement pas le flegme des Anglais. Pivot était bien servi», écrit Pierre Vadeboncœur

Le livre de Pierre Falrdeau, «La liberté n'est pas une marque de yogourt», «au style brûlant et sans retenue des polémistes du XIXe siècle (...) est vite remarqué par le critique Bernard Pivot qui, le premier, sur le plateau de son émission littéraire, salue le cinéaste comme un véritable écrivain». Note: l'homme «invisible» que Bernard Pivot apostrophe est François Macerola de Téléfilm Canada.

Pierre Falardeau à l'émission de Bernard Pivot 1/2


Pierre Falardeau à l'émission de Bernard Pivot 2/2



Deux entrevues
à la télévision de la SRC
À l'émission «En toute liberté» (SRC), Pierre Falardeau raconte à Isabelle Albert son parcours, et aborde ses difficultés de financement. Cliquez ici, pour voir cette entrevue.

«Pierre Maisonneuve à l'écoute» (SRC). L'entrevue avec Pierre Falardeau, ponctuée d'extraits de films réalisés par Pierre Falardeau, se termine par une tribune téléphonique. Cliquez ici, pour voir cette entrevue.

___
* Entrevue pour Radio-Canada.ca et Presse canadienne.
** Cahier spécial, Le Devoir des samedi et dimanche 3 et 4 octobre 2009,
*** Journal La Presse (et Cyberpresse), samedi le 3 octobre 2009.

Deux caricatures parlantes




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