}

dimanche 8 novembre 2009

Poésie grecque contemporaine - Hymne - Marie - C'est pour toi

La Grèce, le berceau de la civilisation occidentale, a été fortement secoué par les guerres, au siècle passé. Guerre civile, répression sans merci, dictature des colonels, opposants politiques malmenés -surveillés, emprisonnées, déportés torturés même, sur des îles désertes de l'Égée. Nombre de poètes durent s'exiler.
«Où que me porte mon voyage, la Grèce se blesse», écrit Giorgo Séféris, diplomate et poète, prix Nobel de la littérature en 1963. Le poète Odysséas Elytis remporta ce prix en 1979.
1973 marqua, enfin, l'avènement de la Réplique, la fin de l'exil, la fin du silence forcé.

La poésie grecque a des racines anciennes qui s'étendent jusqu'à nous. Les poètes grecs ont un point en commun: ils ont foi dans la pérennité de leur langue, la langue d'Homère, la langue-mère.

«Anthologie de la poésie grecque contemporaine», 1945-2000, réunit quarante poètes**. Choix et traduction de Michel Volkovitch. Un ouvrage reconnu dont on loue, à juste tire, la qualité. Jacques Lacarrière termine sa préface ainsi: «Le champ dévolu à la poésie... Il n'est pas seulement devenu européen ou planétaire. Il est devenu stellaire, galactique. Galaxie: encore un terme grec! Pour dire la lumière de la nuit et la mémoire des origines, C'est un peu cela, la poésie grecque d'aujourd'hui, une lumière issue de la nuit et le chant d'une source neuve.»

«Anthologie de la poésie grecque contemporaine» s'ajoute, si je peux dire ainsi à «Anthologie de la poésie grecque antique». J'en ai 2 dans ma bibliohèque: Celle de Robert Brasillach (Le Livre de Poche). Celle de Marguerite Yourcenar, intitutlée «La Couronne et La lyre» (La Pléiade).
J'ignorais qu'il y en avait une troisième, sous la direction de Charles Dantzig, avec une préface de Jacqueline de Romilly, publié en 2000. (Les Belles Lettres). Ah ben dis donc, ça alors?

Je vous donne à lire 3 poèmes tirés de Anthologie de la poésie grecque contemporaine», 1945-2000, de Michel Volkovitch. Un beau moment de lecture...

Hymne de Axion Esti
«Pour langue, on m'a donné la langue grecque,
Humble masure sur le plages d'Homère.
Unique souci, ma langue, sur les plages d'Homère.»
[Odysséas Elytis, p.13]


Marie

Marie songeuse
enlevait ses bas

De son corps s'échappaient
des voix d'autres personnes
d'un soldat parlant comme un oiseau
d'un malade tué par des tourments d mouton
et les pleurs de la nièce de Marie
venue au monde ces jours-là

Marie pleurait pleurait
Mais bientôt riait
le soir elle étendait les bras
et restait jambes ouvertes

Après ses yeux se faisaient sombres
noirs très sombres vitreux

La radio marchait
Marie pleurait
Marie pleurait
la radio marchait

Alors Marie ouvrant les bras
s'envolait
tout autour de la chambre
[Miltos Sakhtouris, p 111]


C'est pour toi
C'est pour toi que j'aime la lumière
Les hommes les arbres qui te ressemblent
Tout ce qui bouge et respire la pierre éternelle
Et le flot partageant tes espaces
Et l'eau chantant l'amour

C'est pur toi et c'est toi
Qui marches dans les miroirs
Et partout dans les choses
Mes sœurs si proches

Et cette table tendre qui voit
Dans son sommeil les deux ailes de tes mains
Et cette table tendre qui entend qui entend
Ton écho secret dans son épais silence

C'est mon cœur qui te soutient comme un drapeau
C'est mon cœur qui t'accueille comme un ciel
[Yorgos Thémelis, p.92]

__
* Qui a vu le film Z, de Costa-Gavras (1969) s'en souvient sûrement encore... Un réquisitoire contre la dictature des colonels. Z est une adaptation du roman de Vassilis Vassilikos fondé sur un fait réel. Wikipédia.
** Pour lire la présentation de l'éditeur de «Anthologie de la poésie grecque contemporaine», cliquez ici.
Paperblog